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L'importance du langage chez les professionnels de santé : éviter une parole nociceptive




Dans la relation soignant-soigné, le langage utilisé joue un rôle fondamental, non seulement pour transmettre des informations, mais aussi pour influencer la perception de la douleur et la qualité de l'expérience du patient. Le choix des mots, le ton employé, et les messages implicites véhiculés peuvent soit apaiser, soit aggraver une douleur. Il est donc essentiel pour les professionnels de santé de développer une communication bienveillante et non nociceptive.


La parole, un puissant médiateur de la douleur


La douleur n'est pas seulement une sensation physique ; elle est aussi influencée par des facteurs psychologiques et émotionnels. Le cerveau humain traite la douleur de manière complexe, intégrant des signaux sensoriels, mais aussi des interprétations cognitives et émotionnelles. Une parole anxiogène, alarmiste ou maladroite peut activer davantage les circuits de la douleur, amplifiant ainsi la souffrance perçue. Ce phénomène est connu sous le nom de catastrophisme, où des mots comme "grave", "irréversible" ou "usé" alimentent la peur et réduisent les capacités du patient à faire face à sa situation.


En revanche, un discours rassurant et encourageant peut activer les mécanismes de contrôle de la douleur, en réduisant la perception de celle-ci. Ce processus s'appuie sur les capacités du cerveau à produire des substances analgésiques, comme les endorphines, favorisées par une relation de confiance et des paroles positives.


En finir avec les paroles anxiogènes


Certains termes ou expressions couramment employés dans le langage médical ou paramédical ont des effets dévastateurs sur l'esprit du patient. Des phrases comme "bascule du bassin", "os déplacé" ou des commentaires catastrophistes face à un bilan radiographique, peuvent induire une vision erronée et désespérante de leur état. Ces formulations laissent entendre que le corps est "tordu", "cassé", ou irrémédiablement abîmé, donnant au patient l'impression qu'il ne pourra jamais aller mieux.


Dire à quelqu'un qu'il a une "bascule du bassin" peut amener la personne à se percevoir comme déformée, ce qui alimente une fixation anxieuse sur son état et freine sa progression. De même, parler d'un "os déplacé" entretient des croyances inexactes sur la biomécanique du corps et peut renforcer la peur d'aggraver la situation par le moindre mouvement. Il est donc impératif de remplacer ces termes anxiogènes par des explications plus précises et rassurantes, basées sur des données scientifiques et une approche pédagogique.


L'importance d'une communication bienveillante


Un langage bienveillant implique de choisir des mots qui responsabilisent le patient sans le culpabiliser, qui expliquent sans dramatiser, et qui encouragent une compréhension active de son état. Par exemple, au lieu de dire "Votre colonne est complètement abîmée", un professionnel pourrait expliquer : "Votre dos montre des adaptations à l'effort, mais il existe des solutions pour vous aider à retrouver une bonne mobilité." Ce type de discours offre une perspective d'espoir tout en transmettant l'information nécessaire.


Les outils de la psychologie pour une communication positive


La psychologie met en lumière plusieurs concepts utiles dans la communication soignante. Parmi eux :


1. L'effet placebo et l'effet nocebo : Ces phénomènes montrent à quel point la suggestion, qu'elle soit positive ou négative, peut influencer les résultats thérapeutiques. Une parole encourageante agit comme un placebo en amplifiant les effets des traitements, tandis qu'une parole négative agit comme un nocebo, renforçant les symptômes.


2. La reformulation positive: Elle consiste à présenter les faits d'une manière constructive. Par exemple, au lieu de parler de "limitations", on peut évoquer des "opportunités d'amélioration".


3. L'écoute active: Le patient se sent entendu et compris lorsque le professionnel reformule ses propos et manifeste de l'empathie. Cela contribue à diminuer son anxiété et sa douleur.


4. La valorisation des ressources du patient: Rappeler au patient ses capacités d'adaptation, ses progrès et ses forces favorise un sentiment d’autonomie et diminue son stress.




Le verbe n'est pas neutre : il porte une charge émotionnelle et cognitive qui influence directement la perception du patient. Les professionnels de santé doivent donc être attentifs à l'impact de leurs paroles. Un mot maladroit peut laisser une empreinte durable dans l'esprit du patient, alors qu'une parole bienveillante peut transformer une consultation en une expérience constructive.


Adopter un langage adapté, non nociceptif, fait partie intégrante d’une pratique de soin de qualité. Cela ne se limite pas à éviter les expressions alarmistes, mais inclut aussi la capacité à insuffler de la confiance et à renforcer l’espoir.


En somme, soigner commence par parler, mais bien parler. Les mots sont des outils thérapeutiques à part entière, et leur juste usage peut contribuer autant que le geste à soulager et à guérir.

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